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Pimkie et Kookaï, la crise du prêt-à-porter fait deux nouvelles victimes

Les célèbres boutiques de prêt-à-porter Kookaï et Pimkie virent au rouge pourpre, menaçant plusieurs fermetures en France et des centaines de licenciements.

Publié le 02 février 2023 à 23:30

Les deux enseignes historiques qui ont occupé la plupart des galeries marchandes et centre commerciaux à travers la France sur les dernières décennies sont aujourd’hui menacées de disparition. En 2022, c’est Camaïeu qui disparaissait du paysage du prêt-à-porter Français laissant quelque 2 600 employés au chômage. Le tribunal de commerce de Paris a placé Kookaï en redressement judiciaire ce mercredi, tandis que Pimkie sera vendue à un groupe industriel qui planifie déjà des fermetures, et près de 500 licenciements.

Le premier magasin Pimkie - qui s’écrit alors Pimckie jusque dans les années 80 - ouvrira ses portes en 1971 dans le centre-ville de Lille, et connaîtra un premier succès grâce à un vêtement encore peu répandu : le pantalon pour femmes. La gamme s'élargira ensuite en proposant du prêt-à-porter féminin pour les 15-25 ans. À la fin des années 80, Pimkie est déjà présent dans toute la France avec une centaine de magasins. En 2017, la marque comptait encore près de 750 magasins. L’année d’après, ce sont 208 postes supprimés et 130 magasins qui tombent le rideau, dont 24 en Belgique. L’entreprise d’habillement a depuis poursuivi sa réduction d’effectifs et ses fermetures et compte aujourd’hui 311 boutiques en France menacées par de nouvelles fermetures.

Kookaï verra le jour en 1983 soit 12 ans après sa rivale et connaît un succès rapide auprès des femmes avec un produit alors peu répandu : la maille. L’enseigne de prêt-à-porter se fera aussi un nom grâce à ses campagnes publicitaires innovantes qui se fera le reflet de la nouvelle génération rebelle. L’entreprise sera rachetée par le groupe Vivarte en 96 et sera revendue à l’Australien Magi en 2017. Le chiffre d’affaires de Kookaï aura connu, en 6 ans, une vraie dégringolade passant de 72.5 M€ en 2015 à 30 M€ en 2021. Plus de 200 emplois seront supprimés sur la période.

Le virage de la mode mal négocié

Prisées à leur début par les 15-25 ans, les deux marques ne semblent plus faire l’unanimité chez les jeunes qu’elles ont tant inspirés dans les années 90. Il y a d’abord le virage de la consommation sur Internet. Depuis les années 2010, les commandes en lignes n’ont cessé d’exploser et le secteur de la mode en est le principal moteur. Si Kookaï et Pimkie offraient des prix attrayants dans leur temps, l’avènement du e-commerce a permis des économies considérables aux « purs players » qui ne se sont pas retenus de casser leurs prix.

Il y a ensuite le virage de la fast-fashion. Cette tendance apparue dans les années 2000 fait un ravage auprès des jeunes consommateurs, mais pas seulement. Avant, une marque renouvelait sa collection selon les saisons, aujourd’hui, vous ne trouverez pas le même vêtement dans le même magasin à un mois, voire quelques semaines d’intervalles. Zara, H&M et Primark pour les magasins physiques. ASOS, Zalando et Shein pour les boutiques en ligne. Les nouveaux rois du textile pas cher sont Espagnols, Anglais ou même Chinois. Pour nos deux marques Françaises, la concurrence des prix est trop rude et les magasins ont peu à peu été désertés.

La crise du Covid et les difficultés économiques n’ont pas aidé. Entre fermetures des magasins, principaux canaux de distribution de ces enseignes, et inflation, c’était déjà scellé pour Kookaï et Pimkie. La première regrette d’avoir « manqué cruellement de moyens et de soutien des banques » suite au refus de prêts garantis par l'Etat (PGE) en période Covid.

Baroud d’honneur

Le placement en redressement judiciaire de Kookaï est d’abord perçu par la direction comme « une opportunité de rebondir et d’assainir sa situation financière ». L’objectif de ce recours est de présenter un plan de continuation pour maintenir l’emploi de ses 320 salariés. Persiste cependant le douloureux souvenir de Camaïeu qui après avoir eu recours à un redressement, à du finalement aller jusqu’à la liquidation et se séparer de ses 2 600 employés.

Pour Pimkie, c’est une reprise mouvementée qui s’annonce suite au rachat de la marque détenue alors par le groupe Mulliez (Auchan, Décathlon, Leroy Merlin, …), par un consortium d’industriels du textile. Si le montant de la cession n’est pas connu, le magazine Challenges écrit « la famille Mulliez (…) s’est engagée à éponger la dette et à financer la restructuration jusqu’en 2025 pour un montant de 250 millions d’euros ». Ce genre d’opération n’est pas totalement surprenant lorsqu’il s’agit d’entreprises en difficulté. Cette reprise pourrait s’accompagner d’une vague de licenciement qui toucherait 500 employés de la marque, et une centaine de magasins fermés d’ici cet été.